C'est du cinéma japonais que Thief, projet electro américain basé à L.A. (dont "l'épine dorsale est constituée de musique de chant sacré samplée") et emmené par Dylan Neal (l'homme au dulcimer dans le projet black metal Bontanist), tire ses premières inspirations... du moins celle qui se dévoilent en amont de la sortie du nouvel et quatrième opus studio Bleed, Memory. Ce dernier succède à Thieves Hymn in D Minor (2016), Map Of Lost Keys (2019) et The 16 Deaths of My Master (2021). La bande-son du clip réalisé pour "Cinderland" s'appuie sur les images du film d'horreur érotique japonais Onibaba (réalisation : Kaneto Shindō), montées en l'occurrence par Sean Sweetman.
Le protoniste principal (accompagné en configuration live par Robert Chaing à la batterie et Chris Hackman à la basse) défend ainsi le bout de gras : "Notre premier single, 'Cinderland', est un hymne électro sombre sur la quête de persévérance et de sens parmi les décombres d'un passé troublé et de souvenirs en turbulence, culminant dans une catharsis chorale de doom metal triomphalement lourd. Une terre bûlée peut être le terrain le plus fertile pour la croissance de la vie. Dans ce clip vidéo (...), nos sujets luttent pour survivre dans leur propre 'pays de cendres'."
Bleed, Memory opère, comme son titre (hommage voilé à l'autobiographie de Vladimir Nabokov, Speak, Memory) l'indique, un travail sur la mémoire, mais... une mémoire en déliquescence. Ce disque s'avère l'un des travaux les plus personnels de Dylan : il prend racine dans un vécu familial et certainement éprouvant, durant lequel le musicien a assisté à l'évolution personnelle de son paternel une fois posé sur sa personne un diagnostic de démence : une période où crises d'oubli et de confusion ont précédé "des épisodes aigus de faux souvenirs, de délires, visions et comportements étranges."
Neal a tiré de ce moment une réflexion personnelle sur ce qui forge l'identité, et a, d'une certaine manière, "pensé contre li-même". "Même s’ils ne sont pas physiquement présents", explique le discours tenu autour du disque, "ils manifestent et effrayent néanmoins ceux qui croient en eux. Ces "fantômes" se reflètent également dans la musique" de Bleed, Memory dont la pochette, nouvelle peinture des Larmes de Saint Pierre du Greco par Joseba Eskubi, est liée au concept : un saint triste à l'apparence spectrale, figeant semble-t-il un sépulcral souvenir.
Neal a délibérément conçu Bleed, Memory pour qu'il paraisse hanté. L'une des techniques qu'il a utilisées pour obtenir cet effet est la "synthèse granulaire" : concrètement, "les échantillons ont été divisés en petits morceaux audio, dépassant à peine 100 millisecondes. Ces blips – ou grains – bouclent extrêmement rapidement et peuvent être superposés les uns sur les autres avec une manipulation supplémentaire de la vitesse, de la phase, du volume et de la fréquence, entre autres paramètres."
Bleed, Memory sort le 19 avril 2024 chez Prophecy Productions. Découvrez "Cinderland" ci-dessous.
> THIEF
- Bleed, Memory (Prophecy, 19/04/2024)
Tracklist :
01. Apparitions
02. Cinderland
03. Paramnesia
04. Pneuma Enthusiastikon
05. Prankquean
06. Dead Coyote Dreams
07. Bleed, Memory
08. Dulcinea
09. Behemouth
10. Hexproof
11. Pissing
12. To whom it may concern