Actualité toujours chargée pour Usher (Norma Loy). Comme de juste, c'est à l'auditeur de piocher selon ses goûts. Le revoici cet été (décalage de la sortie physique liée au confinement) sous le nom Black Egg, en compagnie de Beta Evers, dans un registre cold électronique pour lequel il a de grandes facilités.
Ce format EP revient aux sources du projet (l'album Legacy From A Cold World). Les ambiances des quatre titres s'imposent immédiatement, que ce soit par la conception des sons, les rythmiques essoufflées ("Sestina") ou la grâce-sans-y-toucher de la voix. J'apprécie fortement quand Usher prend le chant (quelques chœurs lents sur le premier titre), mais force est de reconnaître qu'il a le chic pour sentir les voix de ses comparses féminines et pour créer autour de leur tessiture un environnement dense et prenant ("Untold"). Les arrangements prennent place, parfois discrètement ("Sestina"), ailleurs ils s'affirment comme élément indispensable ("Untold" et sa dimension symphonique).
Toutefois, cet EP n'est pas l’œuvre d'un duo comme auraient pu le laisser croire les noms accolés au projet. Peter Render crée les claviers, la boîte à rythmes et les samples de deux titres, tout comme il en mixe un. All von Phllox et Corina Nenuphar apportent leurs touches respectives ; "Lost in Desperation" s'amuse alors à ressusciter une bonne coldwave typée années 1980 (KaS Product, Trisomie 21, et on y attachera le gimmick du son de la fin de la bande FM qui amorce "Untold"). C'est un travail préparé par le cercle restreint des bons potes (ajoutons le mastering impeccable de Paul Fiction pour clore cet aspect).
On remarque alors le seul titre composé par Usher seul : "A lonely Place". C'est un morceau enlevé, et dans son rythme et dans sa diction, avec une mélodie triple qui se bat contre les parasitages bruitistes. À bien y regarder, les photos de Jonathan Abbou développent cette idée : la féminité alanguie brave les crânes morbides, le temps qui passe laisse trace dans des volutes lumineuses que l'obscurité grisera petit à petit. Vivre l'instant et danser son désespoir ("Lost in Translation"). C'est un très bon cru pour Usher.
Pour les amateurs : le vinyle est transparent.