Successeur de Cognitive Buffer Hypothesis (2018), Symbiosis met en œuvre un processus collaboratif entre Brien Hindman et un ensemble d’artistes du sérail Ant-Zen : la moitié des morceaux du cru 2023 résultent d’une association de compétences, et le fruit est d’une cohésion remarquable.
Les huiles numériques des paysages sonores s’étalent, dessinant des ambiances où soi devient royaume ("Solitude", huit minutes où se perdre / se retrouver, à l’instar de ce que proposent les nappes en vagues de "Little Hunter"). Coopérer, hybrider, pas s’opposer. Le disque porte bien son titre : les associations entreprises aujourd'hui ne distordent pas le propos, ne tirent pas vers le conflit d’intérêts : les coopérateurs de Hindman s’engagent dans une aventure à ses côtés, en deviennent arrangeurs ou coscénaristes (la pulsation hypnotique de "Vestigial Structures", avec le concours avec Imminent & Ivardensphere) et donnent à enténébrer le son, à épaissir son voile (Eva|3 sur "Bereavement") ; ou, comme sur "Oesophobia" (compélété par les ornementations de détail de Meredith Yayanos), à maximiser la suggestion d’une peur intérieure décrite comme celle d’une "créature nocturne confrontée aux premières lueurs de l'aube." Les lumières veulent percer le ciel sur la seconde moitié du morceau, tandis que fuient les échos d’une lamentation. Retrouver la cache, vite. Un moment cinématographique, à l’image de l’ensemble de Symbiosis. Un ciselage.
Le disque, en travail depuis cinq ans, ressemble à un microcosmos : l’écoute est un voyage (le démarrage, avec "Cladogenesis", est un envoûtement), un univers comme en déploiement. Les éléments gravitent les uns autour des autres, comme par magie, et vous avez parfois l’impression d’explorer un inconnu où tout se passe plus lentement, se fige parfois. Hindman, avec Symbiosis, a créé un espace-bulle : de secousses douces, de surprises. Une expérience exploratoire, dont la conclusion ("Primordial Soup", avec Tim Kniep) plonge vers l’abysse.