La voix de Clément Barbier est à rapprocher de la beauté de celle de Tamino et de la puissance évocatrice de celle de Phil Von.
Le propos musical, lui, est multiple et sans référence certaine. Les titres 1 et 4 s'inscrivent dans la lignée de Caravan (Duke Ellington, Juan Tizol et Irving Mills). Un peu de Quentin Rollet avec Prohibition, un soupçon aussi de Colin Stetson dans la clarinette de Clément. On a une calme emphase qui se met en place sur "Glasshouses", du plus sombre avec les voix et la tension de "The Feast", et même un bon trip qui vire chamanisme à la Wovenhand sur son final ("Opium Fields").
"Pagan Ritual", le long morceau choisi en ouverture, est un chef d’œuvre au sens où l'entendent les compagnons : la montée en puissance ne laisse rien au hasard, faisant rebondir ce titre sur les murs des cases qu'on astreint trop souvent encore à la musique. Les genres jazz, rock, free, psychédélisme ne signifient plus rien : c'est une dynamique interne qui tend le morceau et le pousse à s'épanouir sans contrainte autre que les envies d'un soliste, d'une nappe, d'un recouvrement vers le tumulte.
Ces dix minutes trente qui ouvrent le disque sont une démonstration autant qu'un champ des possibles pleinement labouré. Ce n'est pas anodin que le groupe ait participé à un hommage à la BO de Twin Peaks. La basse martelée de "Black Heart" (jouée par Laurent Macaigne) possède elle aussi ce charme : magnétique et noise, elle creuse et laisse s'épanouir la mélodie virevoltante. Cet équilibre est sensuel et précieux, il s'engage dans la durée chez les Lillois puisque l'un des nouveaux titres, "Emerald Sky" reprend le nom de leur album précédent.
Le 18 mars, ils devaient ouvrir leur release party à Lille, à la Maison Folie Wazemmes.