Printemps tardif… Évocation de champs ensoleillés, de cerisiers en fleurs, d’une nature vibrante et scintillante. Chihei Hatakeyama emprunte la poésie de son compatriote Yasujirō Ozu, traçant un chemin cotonneux, serti de notes soyeuses de guitare traitée ou de synthétiseur. Le Japonais brille, délivrant un message ambient radicalement beau. Pour débuter, "Breaking Dawn" se présente comme une vignette chamarrée, assez rétro dans ses sonorités (cet aspect vintage se retrouve aussi sur "Memory in the Screen", assez proche de Fennesz) ; une construction claire et bondissante, où l’électronique s’épanouit de façon lumineuse sans charger néanmoins son expression. Le disque navigue entre joie éthérée et mélancolie subtile ("Sound of Air II"), un instantané impressionniste comme seul le Nippon sait le faire. Car depuis ses débuts mémorables au mitan des années deux mille, Hatakeyama a construit une œuvre onirique fidèle à un credo minimaliste abouti et non vain. Le charme opère ainsi une nouvelle fois sur Late Spring, un opus qui a nécessité un temps de travail plus long (presque trois ans).
Ce nouvel effort, inspiré par la troisième saison de Twin Peaks et le concept de mouvement circulaire, magnifie les phases répétitives pour hypnotiser l’auditeur et l’emmener dans un ailleurs céleste et rêveur où l’harmonie s’impose doucement ("Butterfly’s Dream", "Sound of Air II"). On entend par moments du Jeff Pearce ou du Robin Guthrie ("Sound of Air", "Sound of Air II"), et les éléments atmosphériques se mêlent sans sourciller grâce à des nappes puissantes et bienveillantes ("Sound of Air", "Long Shadows"). L’apaisement nous gagne au sein de cette matrice réconfortante. Cependant, quelques perturbations gênent parfois l’osmose sonique (une accélération impromptue sur "Butterfly’s Dream" et "Twilight Sea", un glitch étrange sur "Spica"), mais l’ensemble possède cette sagesse extrême-orientale si profonde. Une bien belle parution saisonnière qui permet idéalement de s’évader, allongé sur l’herbe fraîche…
