Ronny Moorings a toujours, plus ou moins, composé seul. Aux débuts de Xymox, il travaillait sur un matériel rudimentaire. Inutile de dire que cela l’encourageait à maintenir le cap en solitaire, quoique ce se soit certainement pas affaire que de configuration. Lorsqu’il tentait d’associer d’autres personnes à son processus, le résultat n’était pas forcément à la hauteur de ses espérances, ce qui bouclait la boucle de certaines certitudes. Je ferai seul, point. Et j’assumerai.
Il y a la médaille, et ses revers. Une grosse partie du mérite du succès de l’opération lui revient, les musiciens intervenus dans l’histoire de COX prenant le simple statut de serviteurs de la cause. Eux font partie de la tribu. Le revers, c’est un horizon peinant à se redessiner, quand bien même la vision développée par l’homme seul garde pertinence et défende avec vaillance ses codes esthétiques. Rien ne change donc, aujourd’hui et un peu malheureusement, sous le soleil (noir) de Clan Of Xymox. Mais le mérite demeure : contrairement à l’impression très mitigée que nous avaient laissée le single "X-Odus" – ses effets clubby cheap et une vidéo qui, franchement, ne l’est pas moins – l’ensemble du nouvel et dix-huitième (!) opus studio de Ronny Moorings (& co.) s'avère plutôt avoir de la tenue.
Si les formes de la musique de Xymox se sont comme figées, ou du moins ont quasiment arrêté de nous surprendre depuis ce qui pour nous est son dernier grand album, à savoir Creatures (Pandaimonium, 1999), et si le cru 2024 ne change absolument rien à l’affaire, le die-hard fan s’attachera sans doute à Exodus. Les aplats synthétiques froids et dansants de Xymox font souvent mouche, la force des climats est au rendez-vous ("Blood of Christ") et le travail relativement discret des guitares associées aux voix incantatoires maintient un lien traditionnel avec les formes typiques du gothic 80’s.
Dépourvu de concept (a contrario de Limbo, disque témoin du temps de la pandémie et du confinement), Exodus a été "facile à composer", dixit Moorings. L’évidence des écritures tient sans doute à la force des sentiments qui secouaient le protagoniste principal face à l’atmosphère du monde. Exodus a trait à l’atmosphère d’une époque, aux menaces qui germent de la fracturation du monde, dont celle de la Grande Destructrice : le cru 2024 est traversé par l’horreur de la menace nucléaire, et les chansons, autant de bulles de réflexion à défaut d’être protectrices, créent des espaces hypnotiques et qui s'emplissent de la substance mélancolique typique du son Xymox. Curesque dans leurs détails de guitares ("I can see Miles across"), elles envoûtent, distraient ("I always feel the sdame" a la force du single) et maintiennent un cap, un esprit de famille, une vibration communautaire.
