Le contexte de la pandémie n’a pas paralysé les activités de Clan Of Xymox. Le groupe a eu la chance de connaître quelques occasions live en 2020, mais ne nous leurrons pas : s’il n’est guère du genre expansif, le meneur Ronny Moorings s’est retrouvé comme tout un chacun face à l’isolement et la difficulté à se projeter. La paralysie du mouvement, l’impossibilité de réunir des foules : une situation extrêmement préjudiciable à la poursuite de l’activité de musicien, dans un contexte où le live est devenu l’une des principales sources de revenus de ce dernier. Mais face à un quotidien oppressant, l’écriture peut offrir une réponse provisoire, une raison au quotidien… et la communication officielle autour de Limbo le dit bien : son contenu, sans que cela ne surprenne, est lourdement marqué par le contexte de cette dernière année.
Si les thématiques et titres des morceaux de l’album ("Lockdown", ou ce "Great Reset" dont le chant légèrement en avance sur la pulsation – effet discutable, nous l’aurions de notre côté préféré un peu plus à cheval – porte l’angoisse de l’avenir…) traduisent une certaine atmosphère, ce poids du contexte ne semble guère avoir eu d’incidence sur les codes de Xymox et la forme générale de la musique qui s’est imposée depuis le retour aux affaires dans les années 1990 : Moorings reste dans un aplat synthétique froid, dansant et dont l’ADN mélancolique ne déserte pas. Le prédictible rassure-t-il ? Il y aura ceux que les repères réjouiront, les plus conservateurs, et puis il y aura les autres, que le simple maintien esthétique peut inquiéter ou lasser. Une chose est sûre : le son de Xymox ne se sera pas renouvelé à l'ère Covid – mais comme souvent, Ronny parvient à une mixture mélodique et assez envoûtante.
Alors à la frustration, déjà exprimée ici, d’assister au surplace stylistique chez Moorings & co., n’oublions pas d’opposer cette faculté de l’artiste, à nouveau éprouvée, à poser des mélodies qui se retiennent et emportent les corps (le final "How long"). Les adeptes du son actuel de Xymox s’y retrouveront, car Limbo leur offre une collection de chansons assez bien finies et, somme toute, agréables à écouter. Le disque, par moments, capture l’atmosphère d’une époque (le chant erratique de "No Way out", la peur d’une surveillance et d’un contrôle généralisé sur les hommes dans "Big Brother") et dit autre chose qui rassurera forcément les fans die-hard : la maîtrise d’œuvre relevant essentiellement de Moorings, qui travaille chez lui, une situation contraignante, fût-elle de confinement et de mouvement contraint, ne saurait suspendre l’activité d’écriture. Quoi qu’il arrive, la machinerie ronronne toujours.