Yearn… Langueur automnale… Souvenirs d’un autre monde et d’un âge d’or révolu… Au cœur de la forêt, Faunus nous accueille dans son royaume sombre et inquiétant… En cinq longs mouvements, le collectif de San Francisco dessine une symphonie désespérée aux accents rituels prononcés. Ce treizième opus impose une vibration onirique résolument dark et jubilatoire. Ici, l’alto s’épanouit dans une forme incandescente minimale. Ainsi, Common Eider, King Eider reprend ses bases et invoque subtilement l’esprit du compositeur estonien Arvo Pärt. "I" donne la mesure de cet album racé et délicat. Les cordes métalliques s’étalent, comme des nappes obscures aux variations infimes. Une vignette instrumentale triste à mourir mais tellement évocatrice. Ces contours musicaux se développent en profondeur sur la piste suivante. L’ambiance devient plus funèbre et rythmée. Les percussions apparaissent, entraînant progressivement le morceau vers un crescendo cathartique. Le fantôme d’OM et d’un post-rock mystique se découvre, sous couvert de cris étouffés et de déluge noisy.
"III" sert d’intermède occulte. Nous naviguons alors dans les eaux sonores poisseuses de Beckahesten et Grande Loge. Le glas sonne pour nous, pauvres mortels, lorsque le drone tout-puissant nous menace de sa lourdeur. L’incantation se poursuit. Entre silence et atmosphère ténébreuse, "IV" est un titre hautement émotionnel. La voix démoniaque explose, une possession rappelant les très riches heures du black metal suicidaire. Les trémolos de guitare confèrent à l’ensemble un magnifique parfum mélancolique ; place au recueillement. Enfin, "V" se distingue par son tribalisme et son mystère. Les murmures féminins en français renforcent l’envoûtement. En outre, nous entendons poindre l’ambient au sein de cet écrin classique. Yearn se termine sur une note douce et hypnotique, à son image. Common Eider, King Eider réussit une nouvelle fois à nous faire voyager loin, très loin. Sorti le jour d’Halloween, le disque agit comme un sortilège païen…