Apparu au milieu des années 1990, Dawn & Dusk Entwined a acquis un certain culte au fil des ans, personnalisant un univers qu'on a parfois trop rapproché de l'influence In The Nursery. Des labels comme World Serpent, Athanor ou Cold Meat Industry ne s'y étaient pas trompés. En 2011, le projet de David Sabre livrait son huitième et meilleur album avec À l'Aube Des Jours Anciens, mais allait annoncer après trois disques de collection d'archives la mise en repos de l'entité qu'il avait créée.
Contre toute attente, il revient aujourd'hui avec une seule différence : un + à la place du "and". Le style est pourtant toujours bien affirmé, mais développant la dimension très coldwave de l'opus précédent. Pour preuve, le titre introductif "No matter what the Pain" propose une cold classieuse et synthétique : voix grave, rythmique minimale, solennité romantique, tout est là. On sent bien un désir de revenir aux sources de ce que le musicien a écouté dans ses plus jeunes années mais de se les réapproprier aujourd'hui. Du coup, il y a même un côté darkwave/synthwave qui se rapproche de certaines formations actuelles qui reprennent le flambeau des années 1980 sur "Remains of Loss" ou "We are next", comme si les claviers frigorifiques du Movement de New Order ou un Dave Gahan en mode dépressif s'étaient acoquinés avec Boy Harsher, Silent Signals, L'Avenir, Sleep Museum ou tous ces groupes adeptes de synthés et d'obscurité enveloppante. Le chant apporte aussi une dimension pop jamais forcée et finalement très délicate.
Le reste du disque en revient à la dimension orchestrale et élégiaque qu'on peut attendre. "The Shrine", "Beyond" et "Crépuscule", mêlant violons et human voices, témoignent de ces sentiments à la fois glorieux et abattus qu'on aimait tant. C'est un peu comme si des soldats avaient combattu la guerre, l'avaient perdue, mais que tout cela n'était pas grave : il y a quelque chose de beau dans la tristesse de la défaite. Bien entendu, la référence reste In The Nursery, mais les compositions sont de qualité, et les nappages ambient sur piano liquide d' "Entre Chien et Loup" sont absolument poignants. On pense au Harold Budd période The Moon & The Melodies, mais surtout à ce magnifique morceau qui se nomme "In the Wind of Bliss" sur l'album Remergence (2003), sûrement un des plus incroyables titres de toute la carrière de Dawn & Dusk Entwined.
Fait nouveau, David Sabre a décidé d'intégrer la langue française dans deux de ses chansons. Et quand le martial revient sur "Dédales", on ne peut s'empêcher d'y sentir des échos de Dernière Volonté. Au bout du compte, Dawn & Dusk Entwined avait fait partie des premiers projets de "martial pop" - c'est donc on ne peut plus normal. La dimension cinématographique n'est pas délaissée non plus, pour preuve "The Breath of Ishtar" avec son rythme et sa basse menaçante : des drones inquiétants, une trompette funeste, des voix venues des limbes. Dawn & Dusk ou Dawn + Dusk est là et bien là, même si les textes s'éloignent des thèmes païens d'antan pour des thématiques plus liées à l'aliénation contemporaine. Une renaissance dans la continuité, pourrait-on dire.