De Marbre, Opus I. Une carte d'identité.
Dans ces épaisseurs qui se dessinent et se renforcent, il y a la pulsion de vie, il y a le drama. Cette tension existentielle fait l’objet d’une narration, imagée. La mise en forme passe par l’acrimonie, les accords mineurs. De Marbre, tout de guitares, en saturation ou de cristal ("Sillon"), de basses dures et froides, de celles qui nous rappellent la Suisse de Young Gods ou des souterrains Trom. Une école de la rudesse plus que du minimalisme. La démonstration se fait par économie et puissance plus ou moins contenue. Puissance de la rythmique, puissance du son tout court, recherche à travers laquelle se dessine une première essence. De Marbre tranche, ne bavarde pas. Le groupe ici s’appuie sur le rapport au temps, substance filant hors notre maîtrise, pour faire de sa proposition artistique une question de valeurs : par quoi passera la valorisation de votre vie ? Le temps est ce que vous en faites. Nous avons tiré cela pour nous-mêmes d’une "Idole invisible", vous en tirerez autre chose pour vous. Le verbe de De Marbre est une image.
Le quatuor lyonnais assied force personnalité avec ce Feu De Veines aux couleurs extérieures choisies. Un artwork digne de ce nom reflète quelque chose de ce qui se cache en-dessous, de ce qui va se passer. Cette musique est une propagation, et sa force exige : une attention, une résistance parfois. Une austérité se fige dans son ADN, quand par ailleurs le groupe reste capable de dégager ces espaces plus lumineux, exhumer restes d’héroïsme (ces boucles de guitares élévatrices et aux reflets gothiques – osons le mot – qui précèdent le sévère final d’"Aucun Exit" ou concluent "Sillon" avec splendeur).
Ce qui reste, au sortir de l’écoute, c’est ce sentiment de l'aspiration à un art brut. Toucher l’essence du moment vécu : cette seconde que nous ne sommes que rarement en mesure, consciemment, de sacraliser. Feu De Veines est une épreuve, et son final éponyme une apothéose.