Celle qui chante la détresse, hurle le désespoir, crie l'injustice, soupire les poèmes les plus sombres. Celle qui donne la parole à tous ceux rendus muet par l'horreur. Celle dont la voix est instrument de vérité et qui appelle toutes victimes à se battre et mourir dans la dignité. Celle-ci nous propose un autre langage : celui de son piano, dont les notes percussives l'accompagnent depuis ses débuts. Si Diamanda Galàs a une signature vocale indélébile, durant vingt-et-une minutes et dix-neuf secondes exactement elle nous livre ici uniquement les sons de son instrument. Une seule facette de son travail, amorcé en 2012, autour du poème Das Fieberspital de Georg Heym.
Poète expressionniste allemand, d'origine polonaise, Heym meurt tragiquement en 1912 d'une noyade. Dans la lignée des poètes chantés par Diamanda, ses textes font partis de l'élaboration d'une performance pour voix, piano et éléments électroniques. Mais l'artiste choisit contre toute attente de ne nous livrer que le "squelette" de ce travail, enregistré par l'artiste sonore Daniel Neumann en septembre 2019. Et pourtant, ces notes rageusement frappées expriment mille caractères et rappellent musiques et leitmotiv des films muets du début du XIXème siècle. La fureur en plus.
Un parti-pris fort et éloquent.