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Album
03/10/2023

False Fed

Let Them Eat Fake

Label : Neurot Recordings
Genre : énergie et beauté
Date de sortie : 2023/10/13
Note : 80%
Posté par : Sylvaïn Nicolino

Le line-up de folie ! Chanteur de Discharge (Jeff Janiak), guitariste d'Amebix (Stig C. Miller), un des batteurs de Ministry, Nausea, Stone Sour, Soulfly et Amebix (Roy Mayorga) et JP Parsons (spécialiste des scènes folk americana blue grass) en bonus... Pourtant, je ne retrouve pas ici la claque impressionnante qu'avait donnée le "super-groupe" Scum (incluant membres de Amen, Turbonegro, Emperor, Mortiis et Zyklon, pour faire vite). Quand bien même les voix sont éructées avec juste ce qu'il faut de gras pour attester d'un passé et d'une hargne intacte, il manque de l'énergie. Les guitares sont distordues à point, faisant chainon entre punk, crust et univers du metal. Mais quand est-ce que ça défouraille ? Attends ? J'ai même droit à un spoken-word sur guitare claire pour finir ? 

Bon, je mets ma déception sous le coude et je relance le disque.

Faute de claque sonore, d'ultra-violence, on se rabat sur le talent de composition : "Dreaful Necessities" a ce goût de l'Angleterre éternelle, du constat sans appel : notre monde va mal. Un poil de Killing Joke, du street-punk pour la gouaille, des synthés. La basse est là, discrète dans le mix alors que sur ce titre, elle conjugue le temps des new wave sans erreur. La batterie a un son bien lourd et travaillé à la Neurosis ("Superficial"), parfaite dans le break atmosphérique-indus de "The big Sleep").

Il y avait une envie d'être ensemble, mais pas pour faire le disque qui aurait pu être le leur s'ils avaient jammé au milieu des années 1980. Rassemblés, ils auraient alors donné dans la surenchère et composé les titres bourrins que j'attendais. Là, ils ont fait l'album qu'ils veulent... en 2023. Les noms sont un héritage et ils ont eu l'audace de passer outre : ils le disent eux-mêmes dans le final poétique, étonnement beau grâce au traitement de la voix et aux volutes (un sax ??) qui accompagnent les arpèges de la guitare.

L'harmonie, la mélodie, le rythme posé et implacable ("Mass Debate"), c'est celui de la sagesse qui équilibre la rage avec une tension sombre. Les répétitions des voix sont un laminoir tout aussi efficace que la rapidité d'une grosse caisse ("Rise, rise, rise, we will rise" sur "The Tyrant dies") ; les compositions élèvent des spirales pour prendre du recul et aimer face au chaos. "Echoes of Compromise", chanson d'amour à la fin des temps, a cette profondeur épique donnée par les musiques gothiques bien digérées (Fields Of The Nephilim, Paradise Lost) tout en restant inclassable (ni metal, ni goth, ni punk).

Prendre le temps de composer un album qui durera et non pas asséner un coup de poing juste histoire de montrer qu'on sait faire mal. La durée de l'album, flirtant avec la demi-heure, est là encore issue d'une réflexion : il n'y a pas de temps mort ni de morceaux moins bons. 

Un contre-pied, deux écoutes pour changer d'avis, les suivantes pour apprendre et faire de ce disque un standard des années 2020. Bravo.

Tracklist
  • 01. Superficial
  • 02. The Tyrant dies
  • 03. Echoes of Compromise
  • 04. The big Sleep
  • 05. Dreadful Necessities
  • 06. Mass Debate
  • 07. The One Thing we cannot avoid