L’année 2021 s’est terminée sur une note légère, du moins l’écoute de Forever Cascades le suggère. Cette dernière production de Forrest Fang est un nouveau témoignage de son immense talent. Ici, les sons se superposent telles des vagues oniriques pour illustrer ces instants uniques où notre conscience se perd dans la contemplation de la nature. Tout semble immobile et pourtant, des fragments bougent imperceptiblement. La pulsation surgit au creux de nappes subtilement modulées. Ainsi, le génie de Fang s’exprime dans cette manière de faire danser ses morceaux, avec des rythmes sertis dans un écrin ambient lumineux. Nous sommes happés par la densité de son électronique planante, spatiale par moments (cf. "The Land of nine Rivers", proche de Max Corbacho), ouvrant chaque titre de façon progressive. L’immersion peut alors commencer.
Fasciné par le concept de Fourth World du regretté Jon Hassell, l’Américain incorpore une instrumentation exotique, traitée harmonieusement. Le gamelan s’invite sur "Circling the eternal Lake", proposant des textures cadencées qui chevauchent une ligne de cordes serrées et un piano obsédant. Puis "Forever Cascades" est propulsé par le dulcimer et le clavinet, au sein d’une charge aérienne et ondulante, dépassant la vigueur du début pour délivrer l’âme délicate de cette pièce scintillante. Enfin, "Moiré" et "Murmurances" sont ornés de motifs orientaux et de percussions, s’accordant à l’orgue et au violon dans une transe bienheureuse. Forever Cascades est résolument un disque de sensations ; l’apaisement apparaît lorsque la joie se manifeste. Ses sonorités évoquent de temps à autre celles d’estimés collègues, comme Steve Roach et Vidna Obmana ("The Clockmaker") ou bien encore Erik Wøllo. Mais Forrest Fang se distingue néanmoins par un style unique, à la fois organique et synthétique, savamment Berlin School parfois ("Murmurances") ou minimaliste ("Seahorses and Aeolians"). Cet opus charmant, dynamique et éthéré fait honneur au catalogue de Projekt.