Hiemal est une entité mystérieuse de drone ambient. Né de l’imagination d’un certain Atkiak à la fin des années 2010, ce projet rend un vibrant hommage aux majestueux et sauvages paysages hivernaux nordiques. Le temps semble se figer le long de ses morceaux atmosphériques, une puissance statique qui rappelle certains maîtres du genre comme Thomas Köner ou Mathias Grassow. Depuis ses débuts, le Français est en activité constante, proposant des sorties plus qu’extrêmement régulières (rien que pour cette année, déjà une bonne quinzaine d’albums !). Nous avons voulu en savoir plus au cours d’un entretien où nous avons évoqué ses liens avec la scène black metal, la création, sa passion pour l’hiver et son indépendance artistique.
J’ai découvert ta musique pendant le confinement et au début je pensais que tu faisais du black metal avant de l’écouter ! Il y a une certaine aura de mystère autour de ton projet. Peux-tu te présenter en quelques phrases : l’origine de ton pseudo (Atkiak), ta formation musicale et la région de France où tu résides ?
Atkiak : Atkiak est un pseudonyme que j’ai créé pour rester dans l’anonymat, il est inspiré de noms de lieux autochtones d'Alaska. J’ai une formation musicale au piano et je vis dans le sud de la Gironde.
D’ailleurs, pour revenir au black metal, tu as une proximité plus qu’évidente avec cette scène extrême. Tout d’abord ton logo et tes pochettes, qui les a réalisés ? Quels liens entretiens-tu avec ce monde ? Qu’apprécies-tu au sein de cet univers ? J’imagine que des groupes comme Paysage d’Hiver, Wolves In The Throne Room, Drudkh ou Xasthur doivent être des références pour toi ?
J’ai en effet une proximité avec la scène black metal. C’est grâce à ce mouvement musical que j’ai découvert l’ambient, avec des projets comme Paysage d’Hiver, qui m’ont grandement inspiré dans la création de Hiemal. Des couches sonores minimalistes véhiculant un univers grandiose : des mélodies aériennes au synthétiseur par-dessus le bourdonnement des guitares et des blasts beats, une belle interprétation de l’hiver. Dans Hiemal le synthétiseur est accompagné non pas par des guitares mais par des field recordings et des couches de white noise. Le logo a été réalisé par Nox Fragor Art, un artiste chilien qui a également réalisé les pochettes de deux albums : Summoning The Hall Of Stars et Hyperborean Rituals.
Le terme "hiémal" est lié à l’hiver. De même, l’artwork et les titres de plusieurs morceaux sont aussi liés à cette saison. En quoi est-elle inspirante ? Y trouves-tu une valeur et une âme différente ? Que représente cette période de l’année pour toi ?
L’hiver fait partie intégrante de l’univers de Hiemal. C’est une saison avec une atmosphère unique, à la fois sombre et triste, qui évoque les paysages fantastiques et reculés du Grand Nord, souvent inhospitaliers pour l’homme malgré leur beauté apparente. L’hiver c’est aussi l’immobilité, ce pourquoi j’ai choisi la drone ambient pour le représenter.
Quand as-tu réellement commencé à démarrer ce projet drone ambient ? Qu’est-ce qui t’a interpellé dans cette musique ? Sa profondeur ? Sa puissance évocatrice ? Comment décrirais-tu ton art ? Ton esthétique et ton propos musical me font penser aux efforts d’ambient "arctique" de Thomas Köner ou Biosphere. Sont-ce des modèles évidents pour toi ?
J’ai commencé à enregistrer fin 2017, période durant laquelle j’ai voyagé dans le Nord de l’Europe. Ce qui m’a interpellé dans la drone ambient, c’est l’énergie que ce style transmet au travers de textures minimalistes ; sans tempo détectable, l’auditeur se perd plus facilement. J’ai longtemps écouté des projets comme Sleep Research Facility ou Thomas Köner pour lire ou dormir : c’est une musique qui ne s’impose pas et laisse l’esprit voyager. Hiemal est un projet que je décrirais comme étant atmosphérique et minimaliste, une musique qui s’écoute seul à un moment de la journée ou l’on veut ralentir son flot de pensées.
Quels outils de création utilises-tu ?
J’ai utilisé différents logiciels et supports numériques depuis la création de Hiemal, mais mon outil de prédilection reste le synthétiseur MiniNova de chez Novation.
Ta musique est constituée de textures, de drones profonds, elle est très atmosphérique. Pourtant, on décèle à de rares occasions une forme mélodique, l’utilisation du piano, et tu incorpores aussi, donc, des field recordings. Comment vois-tu l’évolution musicale de ton projet depuis le début et pour le futur ?
J’ai beaucoup expérimenté avec ce projet et ai utilisé un piano mais aussi une guitare électrique pour réaliser la couche supérieure de ma musique, celle où l’on peut discerner des synth pads très lents, étouffés par une couche plus profonde essentiellement composée de superpositions de field recordings. Ces expérimentions m’ont permis de trouver ma méthode favorite de composition : de très nombreuses couches d’enregistrement que je ralentis au mixage. Les enregistrements au synthétiseur des derniers albums ont tous été réalisés durant des improvisations.
Tu es extrêmement prolifique, tu sors des opus quasiment tous les mois ! Comment parviens-tu à continuer à produire de cette manière ? Combien de temps cela te prend pour composer un titre et où puises-tu l’inspiration ?
Une sortie peut être réalisée en une seule session d’une journée entière, comme elle peut aussi bien être réalisée en plusieurs sessions réparties sur des semaines. Ma productivité dépend de mon niveau d’inspiration, que je puise au cours de longues marches ou de voyages. Je travaille en forêt, ce qui me permet d’être en contact quotidien avec ma source d’inspiration primaire : la nature.
Tu as choisi de fonctionner en autoproduction, de façon totalement indépendante. Quels bénéfices en tires-tu ? La gestion de ton œuvre te demande-t-elle un gros travail ? Et vas-tu sortir plus de formats physiques à l’avenir ?
Je préfère avoir une totale liberté lorsqu’il s’agit de composition musicale. L’autoproduction me permet de décider seul de tout. Je ne me vois pas travaillant avec un label, du moins pour le moment. Un des seuls inconvénients est la création et le postage des sorties physiques, qui me prennent beaucoup de temps. Je ne pense pas sortir plus de formats physiques à l’avenir, du moins comme je l’ai fait jusqu’à maintenant.