La découverte de la musique de Horskh nécessite un peu de temps. Les néophytes d'un style indus-techno doivent savoir qu'il faut s'immerger dans ce genre pour en saisir les nuances.
Pour les points forts, pas besoin de longues minutes : l'introductif "Tension" a tout dévoilé de ses capacités de bastonnage, de harangue, de violence en une minute et trente secondes. Voilà qui tombe bien puisque le morceau fait deux minutes.
Non, ce qui demande de l'attention, c'est la découverte de la richesse. Il ne faut pas refermer la fenêtre après un seul titre. Horskh a construit son troisième album en développant la matière première qui faisait le sel de Gate (2017). Les fenêtres ont été ouvertes et le duo de départ (Bastien Hennaut, Sylvain Abriel aka Briou) désormais devenu trio (arrivée de Jordan Daviero), s'est maintenant affirmé dans ses audaces. Là où je m'étais lassé il y a deux ans avec Wire, trop vite écouté, cette fois, je me prends une claque. Les breaks sont brouillés, les sons ont gagné en densité. "Turbine ON" est une machine à taper dans les mains, même seul face à son clavier ; sexy comme du Sidilarsen ou du Mass Hysteria, mais avec cette dose de vice, de saloperie héritée des scènes indus et gothiques ("It spreads" : magnifique final angoissant). La musique perfore et attaque plus qu'elle ne caresse, mais elle relie bien ces deux options antagonistes en un seul jet.
Comment dire au plus juste ? Cette musique associe et combine des astuces "classiques" : du Marilyn Manson pour le piquant des guitares ("Do it", "Interface"), du Sin (nos Français oubliés) pour la richesse des textures, du Woodkid pour la facilité avec laquelle les rythmiques alambiquées claquent et s'harmonisent avec les noirceurs ("Body Building"), et puis, tant qu'à ajouter de l'ultra-violence, pourquoi ne pas placer sur "Laying down in the Mud" un peu d'Atari Teenage Riot ?
Pourtant ces références tiennent peu la comparaison, tant Horskh a avancé et marqué des points. Je conseille (en plein milieu de votre lecture de la chronique) de commencer par écouter le titre "XlungX" : sombre, synthé et soudaine agression néo-hardcore, volte pour un pont étonnant, retour à la noirceur. Avouez que ça pose son groupe un tel déploiement, et que les chouettes Moscow Death brigade sont renvoyés dans leur autobus...
Pas sympa de dire ça : Horskh ne cherche pas la confrontation, comme tout vrai bourrin triste. La musique est un exutoire et un rapprochement avec les autres et sur scène comme backstage les garçons ont pour principe de se lier et de fédérer. C'est important que la musique réunisse et rassemble. Leurs paroles adressées à un auditeur ou une auditrice émanent de ceux qui tendent la main après avoir compris les tourments de l'autre ("Distorted again") et la malédiction de notre monde ("Curse") et qui lui proposent la vie malgré tout ("Turbine ON"). Prenez cette main, elle donne force.