Oneironautics est un beau voyage en compagnie de Judith Juillerat. En 2005, Judith avait gagné un concours de remix pour Björk pour son travail sur le titre "A(r)mour" et on la retrouvait aussi au chant sur un titre de T.Raumschmiere. Pour ma part, je l'avais découverte avec sa reprise de Psychic TV ("Black Moon" sur A Tribute to GPO) et dans l'album de Black Egg Legacy From A Cold World.
Son quatrième long format sous son nom confirme une vision et un talent. Il suffit d'écouter deux titres (les pressés apprécieront cet effort de synthèse) : "In Flight" pose avec habileté des ambiances post-industrielles et des réminiscences cold de clubs trip-hop. Ça vrille efficace pour donner une ambiance noire et habitée. "Between you, me and the Gatepost" (voir le clip) atteint un sommet de langueur émotionnelle dans lequel les voix superposées et placées en échos enveloppent de tendresse désabusée. La répétition de la ligne mélodique sert d'écrin à des détails secondaires multiples, dont un passage minimaliste ambient. L'approche peut se faire plus dure, empruntant alors au sweet indus (le larsen sirène de "Swift Tuttle" et l'agencement des dissonances capte et module une attraction-répulsion) ou même au rock psychédélique des années soixante-dix (le riff de guitare ou de basse bruitiste sur "Sin").
Les titres sont longs, sept dépassent les cinq minutes, ce qui dénote une assurance (le plus court, "Para Doxa" irrite consciemment). Les sonorités synthétiques fortes (le démarrage de l'album avec "I had a Dream') permettent un travail sur les couches et les couleurs, densifiant cette musique par un travail habile et sensible, gardant des années passées les astuces qui fonctionnent (la bandeinversée pour la voix de 'Para Doxa'), la référence aux musiques foraines sur le joli 'Riding on a Cloud'. Les capacités démonstratives de ces compositions laissent de la place à l'énergie en midtempo ('Phantasos'). La voix est régulièrement dans un phrasé parlé, à la façon de None ('Half Moon') ; toutefois le mixage place le chant au premier plan, donnant plus de corps.
Le digipack a lui aussi du coffre, en format étonnant puisque désormais UPR lance une ligne 'gold' de trois sorties annuelles, avec cette envie de sortir des objets de collection.