La Main fait de la poésie noire sur de la musique froide. De la poésie déclamée en français et entièrement en français sur ce nouvel album. Exit les quelques titres en anglais présents sur le premier opus Nous Ne Serons Plus Rien (2015) ; exit l'espagnol, comme ce fut le cas avec le superbe titre "La Carne" sur L’Heure de Salir (2017). Sur ce troisième album, on retrouve les éléments incontournables des deux premiers efforts du duo : des mélodies rêches et tendues, une ambiance glaciale et des paroles toujours aussi noires et énigmatiques, à l’image de l’artwork.
Si l’on retrouve les éléments caractéristiques du groupe, La Mélodie du Sombre est loin d’être une simple redite de ses prédécesseurs. C’est un album plus dense, qui demande plus de temps pour être entièrement digéré et qui nécessite plusieurs écoutes afin d’en déceler les subtilités. Car de prime abord, si l’on est séduit par l’ensemble et que la qualité est toujours là, on se dit qu’aucun titre ne se détache véritablement.
Il faut alors véritablement plonger dans l’album, se laisser happer par l’ambiance très lourde de celui-ci : impression d’une longue descente dans les abysses tantôt lente, tantôt rapide. Le titre d’ouverture, "Un Festin", donne directement le ton : il s’agit d’un véritable bloc de noirceur, pesant et inquiétant. Le rythme s’accélère sur "Et J’ai hurlé » et "Vif", deux titres tendus à souhait avec leur boite à rythme martiale et l’impression de malaise quasi palpable. "Silence" joue avec nos nerfs en débutant assez calmement puis en montant en tension sur la fin du titre. Mais le point d’orgue est sans aucun doute "La Mélodie du Sombre", long de plus de six minutes. Ce titre est un condensé de ce que La Main sait faire de mieux : un texte sublime, des nappes de synthés enveloppantes et une atmosphère lugubre.
Sur ce nouvel album, La Main fait un travail remarquable sur les synthés, toujours justement dosés et qui viennent apporter un contraste vraiment intéressant par rapport au côté très sec de la boîte à rythmes, comme par exemple sur le titre "Plus le Temps". Il faut également parler de la qualité des textes qui, bien que souvent impénétrables, sont d’une beauté noire indiscutable. La Mélodie du Sombre est une œuvre aussi belle que terrifiante qui devrait définitivement installer La Main comme l'un des acteurs majeurs de la cold wave à la française.
