Réussite une nouvelle fois pour Rebeka et Carla. Lorsqu'on écoute le deuxième titre, "Ni morte ni connue" (pourtant pas choisi pour être un single, pour l'instant), on a ce qu'il faut en cette période si déprimante. Des voix en italien, fraîches et un peu sirupeuses, une musique dance voilée de tristesse, un déploiement du morceau vers une fête classieuse (les cordes de C. Lassort sur fond synthétique, ça tape toujours).
La formule est évidente, gardant les ritournelles electro de Sexy Sushi, dans un rendu plus cold (à la Kompromat), mais ôtant pour le grand public les provocations trop salaces de Sexy Sushi et la noirceur trop forte de Kompromat. Ces mêmes volutes de cordes distinguent "La Montagne magique", référence à Thomas Mann et aux conclusions du Romantisme allemand. Plus assagi dans ses objectifs, Mansfield. TYA délivre cependant une musique qui se fait plus profonde et plus forte ; ainsi "Soir après Soir" domestique son mid-tempo et fait monter la tension. Soignant les effets et le travail, les compositions offrent une pop électronique qui sonnerait comme une Lio libérée et libertaire ("Les Filles mortes"). Le duo cherche la consécration, mais en faisant ce qu'elles aiment et les astuces "dans le vent" ne sont en fin de compte qu'un juste retour temporel : et si d'avoir été trop en avance, on avait désormais une musique pile poil dans l'air du temps ?
Même lorsque Fanxoa pose sa voix sur "Les Filles mortes", il ne fait ni du Béru, ni du Molodoï, mais livre l'un de ses textes-description-poétique dont il est friand ("Soleil noir" ou son recueil Un jeune Homme Éventré). J'ai en revanche plus de mal sur les premières écoutes avec la scansion en berceuse slam d'Odezenne (Jacques au chant), mixée très en avant, à la limite de la saturation ("Le Couteau") ; avec un renfort du côté féminin et une plus grande place aux harmonies, ça fait mouche ("Une Danse de mauvais Goût", chanté cette fois par Alix d'Odezenne).
Mansfield.TYA fournit encore une fois des morceaux plus doux, sorte de ballades du désespoir, bien plus typées chanson française, légères mais bétonnées dans leurs paroles ("Petite Italie", "Le Parfum des Vautours", "Une Danse de mauvais Goût"). Là où Kompromat et Sexy Sushi gard(ai)ent une unité de ton, Mansfield. TYA joue les laboratoires à idées, passant d'un univers à l'autre, sans forcément ressentir le besoin de laisser les portes ouvertes entre chaque pièce.