Avec Infrarouge, Minuit Machine revient après trois années de silence et une recette inchangée mais… toujours efficace : tandis qu’Hélène de Thoury déploie ses mélodies de synthétiseurs froids et ses beats synthétiques, la voix hantée d’Amandine Stioui vient y distiller l’émotion, ilot d’humanité dans ce paysage électronique.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que ça fonctionne très bien. Chaque morceau d’Infrarouge dégage une atmosphère et une personnalité unique, notamment grâce au chant d’Amandine, à des années lumières de la monotonie d’un Boy Harsher par exemple (pas moins efficace, mais différemment). On notera cependant une pointe d’accent français sur certains morceaux ("Chaos"…) mais qui s’oublie très vite et au final ne gâche en rien la musique, comme en témoigne le succès du groupe (tournée américaine, dates trop rares en France).
"Chaos" introduit l’album en douceur, avec une longue montée en puissance, pour aboutir sur le très bon "DRGS", véritable appel à l’aide derrière son apparence nihiliste ("The world is ending but I don’t care", "we will die but I don’t care"). "Prey/Hunter", offre une progression absolument jouissive, avec cette montée en rythme et ces voix de plus en plus tendues et agressives.
L’ascenseur émotionnel est engagé et on enchaîne sur "Empty Shell". Feeling très gothique mais aussi très dansant : on se rapproche ici d’un Clan of Xymox, moins romantique, plus froid… Froid qui se confirme sur "Ballet", plein de colère contenue avec ces voix qui percent avec peine sous les nappes synthétiques. "98”" ouvre la porte à quelque chose de plus lumineux, tout comme "Fear of missing out" : les nerfs y sont à fleur de peau, mais la mélodie se fait nettement plus enlevée. Le point de chute arrive sur "Sacrifice", renouant avec les influences new wave du duo via cette ligne de basse typique et sa structure pop : tout simplement brillant, et l’un des meilleurs morceaux de l’album. "I am a Boy", reprise du morceau de 2013, tombe dans la mélancolie sur fond de questionnement intérieur et de coming out, tandis que "Forgive me for my Sins" revient vers une forme de romantisme gothique aux échos industriels, la voix hantée d’Amandine faisant là encore des miracles.
Infrarouge est un disque solide, pertinent et au travers duquel Minuit Machine démontre un talent certain tant dans les compositions que dans l’exécution, le tout servi par une production excellente. On en redemande.