En Charente-Maritime traînent de vieilles âmes, chargées d’un héritage : un son crasseux, mécanique et aux acidités désespérées. Elles nous rappellent une certaine Amérique. Une Amérique sombre dont les guitares éthérées et arachnéennes formèrent le terreau d’un underground défiant les tabous, les peurs, les conservatismes. Les guitares de Necro, l’un des fers de lance du projet bordelais ModicuM MorteM (ne pas confondre avec le titre de l’album paru en 2021 de Sadean Blasphemies, projet raw BM du Montana), nous ramènent en effet aux engeances maudites : Mephisto Walz, Christian Death, mais aussi au rock gothique anglais de la première génération. Sans doute pas pour rien si ce premier EP du binôme français contient une reprise du "Alice" des Sisters Of Mercy. Un "Alice" dont les voix ici restent terreuses, la reprise s’employant à rester en des vapeurs charbonneuses, fidèle en cela à l’esprit des premiers Sisters, et s’opposant par nature au lustre qu’Andrew Eldritch donna au remake "Alice (1993)" (l’EP final Under The Gun). Il y a chez ModicuM MorteM, au moins implicitement, un délaissement des flamboyances du gothique, une préférence pour ses recoins poussiéreux, son malaise, sa tension négative. D'eux émane une vibration méphistophélique.
Premier EP de ModicuM MorteM, Deadly Toys est une carte de visite. Le son émerge : mécanique, caverneux. Les rythmiques programmées contiennent visée triple : simplicité, tension, hypnose. Typique de ce à quoi aspira une école electro-industrielle après que les chemins les plus déprimés de la danse eurent été défrichés par Suicide. Le résultat a les inconvénients du do it yourself (la production sent l’autarcie) mais aussi ses avantages (on sent la liberté). Ils font, simplement. Et ModicuM MorteM sait creuser dans les souffrances et l’horreur, sa force évocatrice stimule l’imaginaire ("The Tracker"). Le groupe aime expérimenter et crée sa propre cinématographie. Le bricolage fonctionne, angoisses au menu ("Oh God !", avec Morg). Les voix méritent encore d’être travaillées, c’est certain, mais le binôme dégage une couleur et la force de son intention, elle, ne fait pas de doute. À suivre.