Quoi de plus intrigant que ce qui se cache ?
Muur, énigmatique projet rituel / dark ambient (pas de pages officielles autres que les espaces informatifs créés par son label autour de l’album), présente avec Bod un rituel ambiant d’une durée se rapprochant de l’heure et constitué d’une plage unique. L’écoute peut se faire en ligne, sur support physique (digipack quatre volets) comme sur YouTube (rituel filmé, vous ne verrez rien ou très peu – il ne manquerait plus que ça).
143e référence du label spécialisé Cyclic Law, Bod offre une expérience immersive intense. Pareil procédé réclame une écoute en situation d’isolation. Le mode opératoire peut éventuellement s’inspirer de la vidéo dédiée au rituel. Une pièce sans (trop de) lumière, si possible.
Une résonance ambrée et sourde formalise ce que le projet anonyme nomme "une nouvelle tradition d'arts rituels et occultes issus de diverses bases antiques. Pour cela, une nouvelle culture avec sa propre histoire, y compris une nouvelle langue, a été construite. La signification créée par Muur n’est qu’une interprétation de la nouvelle tradition. Il importe que chaque auditeur construise son propre sens à partir de son expérience." La base musicale abstraite, ainsi, est un livre ouvert : ses pages sont vierges, vous y écrirez vos lignes. Autosuggestion, introspection, catharsis : principes de fond des enregistrements de type dark ambient et qui se doublent en l'occurrence d’un plaisir auditif certain. On n’a pas affaire ici à de vagues collages superposés mais bel et bien à une cathédrale sonore, construction pleine de détails et d’épaisseurs différentes. La progression, lente, gagne une dimension percussive nourrie de saturations cousines du drone doom, la prise d’épaisseur s'opérant sur deux grandes phases successives. C’est une masse noire à conquérir, et le chemin pris peut être réinventé à chaque expérience. Pas de scénario, un voyage en même temps qu’une réclusion.
