Myrkur, un nom à la fois terrifiant et charmant. Une obscurité douce qui s’étale tranquillement selon une formule magique prospère et rafraîchissante… Depuis dix ans, la Danoise Amalie Bruun porte ce projet intime avec une grâce toujours renouvelée. Spine est une confession et même une rédemption. Ce nouvel album est marqué par la maternité récente de la musicienne et la crise bienfaitrice à laquelle elle a été confrontée. En effet, ce nouveau rôle a profondément modifié son rapport aux autres, lui permettant de se connecter plus intensément avec les humains (cf. "Like Humans"). Son enfant l’a redressée, comme une seconde colonne vertébrale (d’où le titre). Car Amalie s’était peu à peu isolée de ses semblables, un retrait renforcé par la pandémie.
Avec ce disque, elle a décidé de s’ouvrir, réunissant tous les éléments qui ont construit son mythe musical. Ainsi, elle renoue avec le black metal qui l’avait fait connaître lors de la parution des déjà légendaires M et Mareridt (qui fut produit par Randall Dunn, tout comme Spine). Une vigueur et une rage qui s’expriment pleinement sur des morceaux comme "Like Humans", "Valkyriernes Sang" (chanté en danois) et "Devil in the Detail", portés par des blast beats incantatoires. Mais l’attrait de cet opus réside dans sa variété. Myrkur emprunte des chemins folk d’une grande beauté, rappelant Folkesange (2020). Armée de son incontournable nyckelharpa, elle nous enchante dès l’introductif "Bålfærd". "Spine" ensuite poursuit sur cette lancée, avec ses accords de piano délicats, la voix proche de Kari Rueslåtten, et son ambiance pastorale secouée de soubresauts metal bienvenus. Et puis, au détour d’un "Mothlike", on rencontre une forme de folktronica pouvant évoquer Bat For Lashes ; aussi, "Blazing Sky" donne dans l’occult rock de Jex Thoth et "Menneskebarn" clôture les débats sous une forme de berceuse new age totalement apaisée.
Vous l’aurez compris, Spine baigne dans des teintes claires-obscures. Mais une nouvelle fois, tout est fait avec un doigté imparable. Le chant de Bruun est magnifique, toujours mesuré, même si le grim apparaît de manière fugace sur "Mothlike". Des notes heavenly sur fond de BM atmosphérique et toujours cette volonté de tracer un sillon vers la mythologique scandinave. Le chamanisme féminin de "Bålfærd" et "Valkyriernes Sang" s’accomode par exemple idéalement avec l’électronique et l’aspect pop de "Mothlike". Bref, un mélange des genres particulièrement réjouissant. Notre coup de cœur saisonnier !
