Les derniers feux d’un mythe transylvain… Zău est l’ultime volet d’une trilogie démarrée en 2015, rendant hommage à cette terre de mystères d’Europe orientale. La mort du batteur et fondateur Gabriel 'Negru' Mafa d’une crise cardiaque en 2017 avait secoué le monde du metal. Negură Bunget s’en est allé et l’acrimonie d’autrefois, dépassée. L’esprit du groupe était encore incarné par les projets annexes Dordeduh et Sur Austru. Et puis, voilà que cette année, les anciens camarades de Negru ont exhumé des bandes datant d’avant leur dernière tournée et ont réussi à réarranger l’ensemble pour correspondre à la vision de leur leader décédé. Il en résulte un album composite, mais finalement pleinement cohérent. Zău s’écoute avec émotion et recueillement, un chant du cygne chargé d’une grande mélancolie. Une légende s’éteint, quinze ans après le séminal Om qui avait révélé les Roumains.
Ici, les éléments de la mue de Negură Bunget sont parfaitement en place. On retrouve l’importance décisive du folklore national en ouverture de chaque morceau. Le combo estime ses traditions, mettant constamment en valeur son patrimoine, une démarche portée chez nous par une formation comme Stille Volk. À ce titre, "Brad" représente la pièce maîtresse. L’ambiance païenne qui s’en dégage est irrésistible : brumeuse, envoûtante, épique. Les voix sont puissantes, habitées et le duo féminin/masculin fonctionne à merveille. Le mysticisme s’épaissit et des images de forêts profondes surgissent immanquablement. Le reste de l’opus continue dans cette lignée, soit un mélange entre sons anciens et modernes. Car le metal s’impose, dans un registre typique, à la fois brutal et atmosphérique. Si parfois l’effet ne prend pas ("Obrăzar" et "Tinerețe Fără Bătrânețe" s’enferment dans une forme traîtreusement violente), cet effort comble les attentes. Comme un symbole, Zău se termine avec le retentissement du clairon, le tribut final au valeureux guerrier Negru. Farewell !