Récemment investie du rôle de claviériste dans le projet doom canadien Vouna, la protagoniste principale de Sataray, fille de chamane (sa mère, aujourd’hui disparue, œuvrait en ce domaine) a pour premier instrument l’harmonium. Depuis 2005, époque à laquelle le projet prenait la forme d’un groupe, elle poursuit une quête exploratoire. En ce début d’année 2022, la voici tracée par la parution de cette nouvelle collection de quatre structures ambiantes et sombres, ensemble dont la formation suit lente maturation : soit ces titres restaient depuis quelque temps en réserve, soit leur finition avait exigé de Sataray ambition et patience. Voyez donc là l’aboutissement d’un processus au long cours.
La démarche présente s’inscrit dans de classiques canons dark ambient (rythmiques en retrait) et travaille sa cinématographie : une substance horrifique, engendrée par un lancinant travail sur les voix (si son approche est peu démonstrative, la jeune femme a par le passé suivi un apprentissage classique de plusieurs années), nourrit des exposés incantatoires. Ecoutez "The Lake".
Le fruit de ces pérégrinations : quatre rituels sonores. La compositrice parle elle-même, pour fixer le contexte de la fabrication de ces climats, d’"états de conscience variés dans le cadre d'explorations occultes du monde naturel." Et si nous regrettons le fait que les reliefs ne soient pas plus amples – le do it yourself fait aussi le charme de la démarche – il n’en demeure pas moins : la jeune femme a un style certain, et parvient à créer un envoûtement.
Sa présence a pu être remarquée lors d’évènements consacrés à l’ésotérisme ou à l’occultisme, et vous le ressentirez à l’écoute : si tous ses codes ne surprennent pas forcément, Sataray s’est tout de même construit un univers, en lequel d’autres ont pu se reconnaître. Un split avec Zania Morgan est sorti, et Sataray se fait tranquillement une place dans le monde des musiques atmosphériques. Elle travaille sur ordinateur et produit à base de claviers une musique instinctive. Un travail empirique, qui aboutit à ces petites sculptures sonores marquées par une certaine gravité et dont la dimension introspective interpelle. Blood Trine Moon témoigne, avant tout, d'un vécu et d’une force d’intention.