Huntress est un disque de la susurration. Alice Kindalini fait des cauchemars la nuit et les couche à l’intérieur du son qu'elle a posé sur l'album. Nouvel et quatrième opus studio de son She Spread Sorrow, cet ensemble s’inscrit dans une tonalité froide et rentrée. Le disque suit un scénario bâti à partir du cauchemar : l’histoire d’une chasseuse, Blue, hantée par la présence d’une autre femme.
L’exposé musical reste dans un feutre anxiogène : les trois ans d’efforts préalables ont mené à un résultat en retenue – sur la forme, du moins, car sur le fond, Kindalini étale sur quarante minutes une huile digitale noire, un sentiment dérangé. Le feeling, obsessionnel, nourrit des trames sonores aux teintes dangereuses, éventuellement zébrées de vibrations basses/ultra-basses. Pour furtives que soient ces dernières, elles vous travaillent au ventre. Pour de vrai. L'épreuve est physique, intérieure.
Kindalini maîtrise son sujet. Noir et hypnotique, ce travail est de forte suggestion, tout de violence contenue. La marque de fabrique d’Alice. Huntress : une œuvre immersive, invitation glacée à vivre l’épreuve secrète du rêve. En l’occurrence, vous le ferez de manière éveillée. Ne fermez pas les yeux trop longtemps, on ne sait jamais.
