Steve Roach sort une nouvelle fois de sa grotte pour nous ensorceler. Chamane un jour, chamane toujours… Un homme à tifs actif qui ne s’en laisse décidément pas conter. Maître de la galaxie planante depuis quatre décennies, l’Américain impose sa marque en toute simplicité. Une force tranquille qui trace son chemin dans le désert d’Arizona, convoquant les éléments farouches pour faire voyager un public en extase. Mais cette oasis sereine se trouble. En effet, Zones, Drones & Atmospheres est une œuvre contemplative et aride. L’austérité du son renvoie d’ailleurs à des opus plus anciens, certains des nineties. Si les nappes s’entremêlent harmonieusement dans une chorégraphie minimaliste parfaitement orchestrée, les textures générales sont extrêmement lourdes. Le disque navigue entre deux eaux. La vivacité lumineuse de "The living Space" par exemple se heurte aux volutes dark de "Neomorphic", morceau outré d’électronique spatiale noire (cf. Neptune Towers). Ce parti pris de l’artiste est audacieux et rappelle le glorieux essai du genre d’Eno avec Apollo.
Mais en dehors de cette référence éculée, on perçoit des bribes esthétiques diverses : Stellardrone sur "Breathing Light", avec sa puissance atmosphérique, ou bien encore le Stalker de Rich/Lustmord sur "Shadow Realms". Roach dessine ici un ambient profond, dénué de tout tribalisme. Une expérimentation radicale dans sa dimension oppressante, relevée de strates éthérées. Ainsi, "Holding Light" s’affirme comme une pièce classique, rendant hommage à l’univers de Hearts Of Space et au talent onirique de Max Corbacho et Craig Padilla. À noter que la version CD ne comprend que sept titres, "Submerged" et "Isolation Station" étant uniquement disponibles en format digital. Ces deux plages d’une heure de moyenne chacune invitent à l’introspection inquiète. Le ciel s’assombrit, les élans synthétiques bougent imperceptiblement pour revenir vers un centre tellurique macabre ; une odyssée musicale effroyable, poussant toujours plus loin le concept de répétition hypnotique.