Digital Media / Dark Music Kultüre & more

Chroniques

Musiques, films, livres, BD, culture… Obsküre vous emmène dans leurs entrailles

Image de présentation
Album
31/07/2020

The Psychedelic Furs

Made Of Rain

Label : Cooking Vinyl
Genre : new wave / pop art / spleen rock / post-punk
Date de sortie : 2020/07/30
Note : 80%
Posté par : Emmanuël Hennequin

Le temps n’est pas forcément assassin. The Psychedelic Furs, phare post-punk / new wave, a rallumé les feux de la scène depuis le début des années 2000 (avec dans les premiers temps le guitariste Richard Fortus [de Pale Divine, collègue aussi des Butler dans le projet post-Furs Love Spit Love])… et la possibilité d’un nouvel album se murmurait  depuis plusieurs années.

Mais là où d’autres tergiversent et miment des annonces sans que rien ne se produise jamais, The Furs se décident à agir. L’accumulation des tournées sans nouveaux titres, à rabâcher le passé, produit normalement des effets… sauf sur ceux qui ne savent plus écrire (perd-on jamais la main ou est-ce la chimie de groupe ?) ou – bien pire –  les rentiers du fond de catalogue, les contribuables feignants. Horreur : les deux catégories se confondent parfois, sauf à ce qu’un (bon) management trouve les mots.

Et c’est Rich Butler qui le dit : "Nous sentions que nous devions faire un album."
Bien leur a pris. Made Of Rain n’est pas collection au rabais. The Psychedelic Furs, dans sa mouture 2020 (Rich & Tim Butler, fratrie obligée, plus le saxophoniste Mars Williams, Rich Good aux guitares [il est là depuis plus de dix ans], Paul Garisto aux fûts et Amanda Kramer [active depuis 2002] aux claviers) se redéploie : le groupe est à la fois dans la morsure et spleen,  la retenue et le nerf. C’est une musique mûre - non, ce n’est pas un cliché - mais qui nous évite l’effroyable écueil de la mollesse.

Made Of Rain, encore non, n’est ni tiède ni ne sonne réchauffé : le groupe s’y montre inspiré et les formats singles, titres parmi les plus spectaculaires, ne cachent pas le reste de la forêt. Richard Fortus (Gn’R, Thin Lizzy) est dans le sérail des Butler et le bonheur des expériences passées, les affinités humaines sans doute aussi, expliquent sans doute son investissement sur le long terme : un accompagnant n’est pas forcément qu’un musicien. La production de Fortus, car il s’agit de cela, respecte le nerf des chansons, quand le mix de Tim Palmer (The Mission) les patine.

Et cette collection de choses renvoie précisément l’image de quelque chose de libre et soigné. Musicalité unie. Les singles sonnent tels de nouveaux classiques, à commencer par "Don’t believe". Les guitares, acides stridences, zèbrent ici le ciel dont la menace orageuse est dans cette percussion au nerf contenu. Le saxophone de Williams, économe et qui n’en fera jamais trop, colore à la marge. Grand morceau. Le même commentaire sera fait quant à la force de frappe émotionnelle de "No One", sans doute LE grand tube du nouvel album, ce moment où le groupe réussit la chanson quasi-parfaite : spleen définitif, rythmique roborative, il y a tout. Quant aux gimmicks americana introduisant "You’ll be mine", autre hit, ils laisseront des traces : The Psychedelic Furs veulent colorer et offrent une collection d’ambiances, jusque dans une inconfortable étrangeté ("Come all ye Faithful").

Le temps est un allié, et ce line-up conserve une histoire même si les musiciens aujourd’hui actifs ne peuvent tous se targuer d’avoir soufflé les vents des origines. Conscience des choses, poids d’une histoire et chimie : The Furs brillent encore et reviennent avec un disque intime et mélancolique : c’est une musique qui se concentre sur l’intériorité et n’est pas happée par le monde ou ses tensions. Elle n’en reste pas moins le fruit d’une action existentielle et laisse une trace en dedans. Une de plus.

Tracklist
  • 01. The Boy that invented Rock & Roll
  • 02. Don't believe
  • 03. You'll be mine
  • 04. Wrong Train
  • 05. This'll never be like Love
  • 06. Ash Wednesday
  • 07. Come all ye Faithful
  • 08. No-One
  • 09. Tiny Hands
  • 10. Hide the Medicine
  • 11. Turn your Back on me
  • 12. Stars