Affermir, trouver un son de groupe. C’est un chemin : tailler dans le superflu, aller à l’os. Nous allons le faire, ensemble, parce que nous le voulons, parce que nous sommes d’accord sur la méthode. Le passé, ses canevas, importent peu. Un positionnement se gagne dans la conscience d’un objectif partagé : sculpter une globalité, la dire aujourd’hui. Cette aventure se vit à plusieurs.
Le disque est dédié à Philippe Pascal (Marquis de Sade, Marc Seberg). Et l’économie et la sensibilité nue des nouveaux exposés des Belges The Ultimate Dreamers le laissent imaginer : ce chemin-là, celui des sacrifices, a été parcouru. Les canevas épurés, l’élégance recherchée dans les colorations de guitares, leurs boucles de légères acidités et curesques ("Energene"), les fréquences basses incurvées, la voix posée, sa posture en retenue ("Far away" et ses reliefs Sisters Of Mercy période 1985), pour ne pas dire rentrée : un vague à l’âme se creuse sur Paradoxical Sleep et le beat minimal renforce ce sentiment d’une volonté du collectif de vouloir exprimer par le nu les complexités de la zone intime. Hypnotique ("Kids alone"), froid dans ses reliefs globaux mais charnel par ses nervures, ce son porte dans son formalisme un référentiel 80’s, les codes sont voyants et assumés, mais ce qui se trame à l’intérieur de ces chansons a un parfum d’universalité. 
Les codes peuvent tirer vers le gothique s’ils veulent ("Digging"), vous garderez avant tout de Paradoxical Sleep le souvenir d’un bloc de chansons uni par une hauteur, une maîtrise. La production est signée Len Lemeire (Anne Clack, Implant), elle confine à une transparence. Dans ses noirs apprêts, le son du groupe nous rappelle un vieux Curtain ("Deafness", encore), sa rigidité est sensible. Sans doute The Ultimate Dreamers entrent-ils alors avec le cru 2025 dans ce qui restera, pour l’heure, son moment le plus ferme, le plus recherché et authentique.
