Dans une lignée Hems et Diabologum (pour la voix de Léonard sur "Heureux je suis" et "Exil"), voici les fous-furieux de Tisiphone. Leur rock noisy s'échappe très vite des conventions inhérentes au genre grâce aux cris très étonnants de Clara ("Heureux je suis"). Après un premier LP en 2016, le trio bat ses cartes ; il a d'abord placé une reprise d' "Alcaline" d'Alain Bashung sur la compilation Made in France d'Unknown Pleasures Records, et vient maintenant cet EP.
Ce n'est pas punk, pas plus que ne l'étaient Lucrate Milk ; ce n'est pas gothique non plus, pas plus que ne l'étaient les Forguette Mi Note. Ils sont de Lyon, alors on peut aussi songer aux Haine Brigade pour ce côté foutraque-j'm'en fous des étiquettes. "Atomic Tissue" se la joue post-punk à la manière d'Edith Nylon (mais en mieux joué et mieux produit) et se lance dans un virage noise à la Drive Blind à grand renfort de voix superposées.
Le superbe "Bully" se fait plus cold, histoire de refermer le long EP de trente minutes avec un mood plus cotonneux. Enfin "Rageux" place un poème épique et noir sur un fond sonore de punk synthétique non formaté. Cet aspect inclassable leur a permis de décrocher des premières parties pour Jeanne Added, Frustration ou encore Algier. "Nasty Kids", par son côté blues-cold et ses percussions bien arrangées se glisse dans les envolées fumeuses de ces derniers avant un virage post-psychédélique de bel effet. 
Comment cet EP de six titres réussit-il à agréger tant de particularités ? Par une nuance sombre qui nimbe l'ensemble, y compris sur les bizarreries kosmische de la deuxième partie d' "Exil". Tisiphone est le nom de l'une des déesses grecques chargée des vengeances avec ses sœurs Mégère et Alecto. Filles de Nox, la déesse de la nuit, ou bien filles de Gaïa, ou encore nées du sang d'Ouranos lorsque Cronos le mutila, les trois Furies trouvent dans ce trio de quoi densifier l'imaginaire.
