Sans vouloir faire de mauvais jeu de mots, il y a clairement eu un avant/après la signature de Veil Of Light chez Avant! Records. L’atmosphère grise, la voix lointaine et l’aspect rêche de la musique des débuts se sont peu à peu éloignés pour laisser place à davantage de couleurs. La meilleure illustration de ce changement étant sans aucun doute la pochette (pas vraiment réussie il faut le dire) rouge de l’album précédent Front Teeth (2017), qui contraste de manière drastique avec le gris des premiers efforts du duo emmené par M, énigmatique tête pensante. Pour autant, les Suisses n’ont pas basculé dans la synth-pop et ont conservé le côté sombre et dépressif inhérent à leur musique. Inflict poursuit dans cette lignée et l’incendie présent sur la pochette laisse présager que l’album ne sera pas des plus joyeux.
Le ton est donné dès le titre "So hard", qui grâce un beat entêtant et une voix pleine de réverb donne une furieuse envie de découvrir la suite. L’ambiance dancefloor EBM est toujours présente sur "You done me wrong" avec un refrain efficace, sans fioritures. Quant au premier single "Fact2019", il s’agit clairement d’un des meilleurs morceaux de l’année dans le genre. Mais après cet excellent démarrage, l’album retombe un peu. Il faut dire que la voix assez monotone de M peut être rapidement lassante. Il faudra attendre le très beau "Inflict" et le dantesque titre final "Nothing left" pour que le disque décolle à nouveau.
Finalement, même si tous les morceaux ne se valent pas, ce quatrième opus semble être la combinaison parfaite entre les débuts post-punk/dark wave du groupe et leur évolution plus électronique. En mettant en avant ses tourments, M donne à Inflict l’aspect émotionnel qui manquait à Front Teeth avec un thème du changement omniprésent. Qu’il soit personnel ("I tried so hard to change myself") ou bien qu’il soit attendu de quelqu’un d’autre ("I was wainting for a change for too long") avant de faire l’amer constat que finalement rien ne change vraiment sur le dernier morceau. Un disque qui laisse entrevoir les failles, et c’est finalement cela qui fait la force de Veil Of Light.
